Chèques-vacances des retraités : nouveau rebondissement dans un feuilleton administratif sans fin

Les anciens fonctionnaires pensaient avoir gagné la bataille en juin dernier. Le Conseil d’État venait d’annuler la circulaire qui les privait depuis octobre 2023 de leurs chèques-vacances. Un soulagement de courte durée. Quinze jours plus tard, le gouvernement Bayrou publiait un nouveau texte reproduisant exactement la même exclusion.

Une bataille juridique acharnée pour 9 millions d’euros

L’histoire débute en 2023 quand le gouvernement Borne cherche désespérément des économies. Parmi les pistes identifiées : supprimer l’accès aux chèques-vacances pour les 29 000 retraités de la fonction publique qui en bénéficient encore. Un calcul simple mais symboliquement désastreux : 6 millions d’économies en 2024, 9 millions en 2025.

Six organisations syndicales montent immédiatement au créneau. FO, UNSA, FSU, Solidaires, CGT et CFE-CGC dénoncent une mesure qui frappe des retraités modestes, dont le revenu fiscal de référence moyen n’excède pas 7 000 euros annuels. Après un recours gracieux resté lettre morte, ils saisissent la justice administrative.

Le 24 juin 2025, victoire : le Conseil d’État annule la circulaire d’août 2023 pour vice de procédure. Le comité interministériel d’action sociale n’avait pas été consulté. Les syndicats exultent, l’UNSA-Retraités se félicite que « le gouvernement soit ramené à la raison ».

La riposte éclair du gouvernement Bayrou

L’euphorie syndicale ne dure que quinze jours. Le 11 juillet, le gouvernement convoque en urgence le fameux comité et lui soumet une nouvelle circulaire quasi identique à la précédente. Les représentants syndicaux demandent l’ajournement, puis claquent la porte de la réunion. Rien n’y fait : le texte est publié le 22 juillet.

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« Dans le contexte budgétaire actuel, on ne va pas revenir sur une mesure d’économie », justifie sobrement le cabinet de Laurent Marcangeli, ministre de la fonction publique. Un argument qui passe mal auprès des organisations syndicales, qui voient dans cette obstination une double volonté de stigmatiser retraités et fonctionnaires.

Le député macroniste Mathieu Lefèvre avait pourtant alerté dès octobre 2024 sur une anomalie criante : les retraités du privé conservent, eux, l’accès au dispositif via leurs anciens comités d’entreprise. Une rupture d’égalité qui pourrait alimenter de nouveaux recours.

Car les syndicats n’ont pas dit leur dernier mot. La CGT et ses alliés examinent déjà les voies juridiques pour contester cette nouvelle circulaire. D’autant que le dispositif reste ouvert dans d’autres branches de la fonction publique : les retraités territoriaux peuvent toujours constituer leur épargne via la CNRACL, et les hospitaliers via le CGOS.

Un symbole des tensions budgétaires actuelles

Cette affaire des chèques-vacances révèle les tensions qui traversent l’appareil d’État. D’un côté, un gouvernement aux abois qui traque la moindre économie pour boucler un budget 2026 déjà sous haute tension. De l’autre, des syndicats qui refusent de voir rogner des avantages sociaux historiques, surtout quand ils bénéficient aux plus modestes.

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Le dispositif permet pourtant une bonification substantielle : selon les ressources, l’État ajoute entre 10 et 30% à l’épargne constituée par le retraité sur 4 à 12 mois. Pour un ancien agent aux revenus modestes, cette aide représente un coup de pouce non négligeable pour partir en vacances ou accéder à des loisirs culturels.

L’enquête menée par l’UNSA-Retraités révèle l’ampleur du problème : 82% des retraités percevant entre 1 000 et 1 400 euros de pension déclarent ne plus pouvoir financer voyages et loisirs. Un chiffre qui grimpe encore à 62% pour ceux touchant entre 1 400 et 2 000 euros mensuels.

Face à ces réalités sociales, la suppression des chèques-vacances apparaît comme une mesure d’autant plus douloureuse qu’elle ne génère que des économies marginales au regard du déficit public. Mais dans un contexte où François Bayrou a annoncé le non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite, chaque euro compte.

La bataille des chèques-vacances n’est probablement pas terminée. Entre recours juridiques et pressions syndicales, le gouvernement pourrait être contraint de revoir sa copie. À moins que la mesure ne finisse par s’imposer dans l’indifférence générale, noyée dans le flot des restrictions budgétaires qui s’annoncent. Pour les 29 000 retraités concernés, l’été 2025 aura en tout cas un goût amer.