L’assurance-vie bat le livret A ? : le grand transfert d’épargne des Français en 2025

Les épargnants français opèrent un virage spectaculaire. Alors que l’assurance-vie bat tous les records de collecte depuis janvier, le Livret A perd son statut de refuge privilégié et voit les retraits se multiplier mois après mois. Ce basculement majeur redessine la carte de l’épargne française.

Des flux massifs vers l’assurance-vie qui pulvérisent les records

Dès le mois de janvier, l’assurance-vie franchit la barre symbolique des 2 000 milliards d’euros d’encours, affichant un rythme de cotisations historique. Les versements ont atteint près de 130 milliards d’euros entre janvier et août, portant la collecte nette à plus de 34 milliards sur les neuf premiers mois. Ces chiffres surpassent largement la performance de 2024 dans son intégralité.

Ce mouvement prend une ampleur sans précédent au premier semestre avec 26,6 milliards d’euros collectés, un sommet inédit depuis 2010. Les mois d’été ne marquent aucun ralentissement : août établit un nouveau record mensuel avec 12,1 milliards de cotisations, soit une hausse de 26% sur un an. En septembre, l’élan se maintient à 14,9 milliards, confirmant une dynamique durable qui traverse toutes les saisons.

Les unités de compte captent désormais 39% des flux annuels, mais les fonds euros retrouvent aussi les faveurs du public. Après des années de décollecte, ils affichent sept mois consécutifs de progression. Leur rendement moyen attendu de 2,6% en 2025, dans un contexte d’inflation tombée autour de 1%, procure un gain réel attractif. Les assureurs n’hésitent pas à proposer des taux bonifiés pour séduire de nouveaux souscripteurs.

Sur 365euros :  3 raisons de souscrire un PEL en janvier 2023

Le Livret A dans la tourmente après la chute de son taux

L’histoire est tout autre pour le Livret A. Depuis l’abaissement de son taux à 1,7% le 1er août, les retraits s’enchaînent. Dès juillet, une décollecte de 70 millions apparaît, phénomène rarissime pour cette période habituellement favorable. Septembre aggrave la situation avec 1,95 milliard de sorties nettes, puis octobre pulvérise tous les compteurs : 3,81 milliards s’évaporent du livret star, portant la décollecte combinée avec le LDDS à 5,1 milliards.

Sur les dix premiers mois de l’année, le bilan est négatif de 2,8 milliards pour le Livret A seul. L’encours global Livret A et LDDS retombe à 601,7 milliards fin octobre, effaçant tous les gains accumulés depuis janvier. Cette hémorragie contraste violemment avec les années 2022-2023 où le produit bénéficiait d’une attractivité exceptionnelle, son taux atteignant alors 3%.

Les raisons de cette désertion sont multiples. Outre le paiement de la taxe foncière et des régularisations fiscales qui pèsent traditionnellement sur l’automne, l’effet psychologique de la baisse de taux joue pleinement. Les épargnants comparent, calculent, et choisissent massivement de rediriger leurs liquidités vers des supports plus rémunérateurs. Le plafond de 22 950 euros limite par ailleurs la capacité de dépôt, là où l’assurance-vie accueille des montants illimités dans un cadre fiscal stable et prévisible.

Les perspectives financières guident désormais les arbitrages d’épargne. L’amélioration progressive des rendements obligataires a mécaniquement dopé les performances des fonds euros, dont les portefeuilles se composent majoritairement d’obligations souveraines et d’entreprises. Parallèlement, l’inflation redescendue grignote le pouvoir d’achat réel du Livret A, dont le taux nominal ne compense plus l’érosion monétaire comme auparavant.

Sur 365euros :  L’assurance-vie est toujours l’épargne préférée des Français en 2022

Les ménages recherchent des placements capables d’allier sécurité relative, horizon d’investissement adapté à la préparation de la retraite et transmission patrimoniale. L’assurance-vie coche ces cases grâce à sa flexibilité entre fonds sécurisés et unités de compte, ainsi qu’à sa fiscalité avantageuse après huit ans de détention. À l’inverse, l’épargne réglementée perd du terrain face à des produits désormais jugés plus performants.

Au-delà des choix individuels, cette redistribution des flux d’épargne porte des conséquences macroéconomiques majeures. Les encours d’assurance-vie constituent une source de financement longue et stable pour l’économie. Les assureurs orientent ces capitaux vers l’État via les obligations souveraines, vers les entreprises à travers titres obligataires et actions, vers les infrastructures et l’immobilier. Cette fonction d’amortisseur financier, moins volatile que d’autres sources de capitaux, contribue à stabiliser le système dans son ensemble.

La baisse de régime du Livret A pose en revanche question pour le financement du logement social via la Caisse des Dépôts, traditionnellement alimentée par ces ressources. Les arbitrages d’épargne dépassent donc le cadre des rendements personnels pour toucher des pans entiers de l’économie réelle. Le Plan d’Épargne Retraite poursuit aussi sa montée en puissance avec 11,6 millions de détenteurs pour 125,7 milliards d’encours fin 2024, confirmant l’appétit croissant pour les placements orientés vers le long terme.