Dans les entreprises françaises, c’est le branle-bas de combat. Les CSE distribuent en ce moment leurs chèques cadeaux de fin d’année, une enveloppe plafonnée à 193 euros par salarié en 2024. Un petit bonus qui tombe à pic avec l’inflation. Mais qui peut vraiment en profiter ? La réponse n’est pas si simple.
« On m’a dit que j’étais là depuis trop peu de temps », peste Marie, stagiaire depuis trois mois dans une PME parisienne. À tort : un récent arrêt de la Cour de cassation a balayé toute condition d’ancienneté. Les entreprises ont jusqu’au 31 décembre 2025 pour s’adapter, mais le message est clair : pas de discrimination possible.
Les (salariés) absents ont toujours raison !
Le cas des salariés absents fait souvent débat. « Je suis en arrêt depuis septembre, je ne pensais même pas recevoir mon chèque », confie Paul, commercial dans l’automobile. Pourtant, l’URSSAF ne laisse aucune place au doute. En congé parental ? En arrêt maladie ? En vacances ? Peu importe, le chèque doit arriver.
Les patrons entre deux chaises
Pour les dirigeants, c’est le grand écart. Un gérant qui cumule un contrat de travail avec son mandat peut toucher ses chèques sans charges supplémentaires. Son voisin, simple TNS, verra son cadeau amputé des cotisations sociales. « Je préfère m’en passer », admet Sophie, gérante d’un salon de coiffure. « Avec les charges, ça revient plus cher qu’une prime classique. »
Où utiliser ses chèques cadeaux
La distribution, lancée mi-octobre, bat son plein jusqu’au 31 décembre. Ces titres représentent un marché de 2,3 milliards d’euros, trusté à 90% par les grandes enseignes. Une concentration qui fait grincer des dents.
« Pour un chèque de 20 euros encaissé, je dois reverser entre 1,6 et 2,4 euros de commission », calcule Thomas, libraire indépendant. « Sans compter les frais de gestion et le délai de remboursement qui peut aller jusqu’à deux mois. C’est impossible pour ma trésorerie. »
Le système favorise mécaniquement les grandes surfaces. « On nous parle de ventes additionnelles, de nouveaux clients… Mais avec 10% de commission et des délais de paiement à rallonge, seuls les gros peuvent suivre », résume Arnaud Lepage de la Confédération des commerçants de France.
Des solutions émergent, comme les chèques centre-ville qui limitent les commissions à 5-6%. Certaines villes tentent aussi le coup des monnaies locales. Mais ces initiatives restent marginales face aux mastodontes du secteur.
En attendant, les CSE privilégient encore massivement les réseaux traditionnels. « On préfère offrir un large choix aux salariés », justifie Marie-Claude, élue CSE dans une entreprise de 300 personnes. Une position compréhensible qui pose question : ces chèques, censés doper le pouvoir d’achat local, finissent-ils par renforcer la position dominante des grandes surfaces ?
Publié le 4 décembre 2024 par Catherine Lagarde – Dernière modification le 4 décembre 2024
Catherine travaille pour 365euros depuis 2020. Elle est en charge des rubriques conso, budget, bons plans et société