Un amendement voté fin octobre pourrait modifier substantiellement la fiscalité de l’épargne en France. Les parlementaires ont approuvé une augmentation de la CSG sur les revenus du capital, susceptible de faire passer le taux du prélèvement forfaitaire unique de 30 à 31,4%. Mais plusieurs étapes restent à franchir avant que cette mesure ne s’applique réellement aux épargnants français.
Une hausse ciblée qui rapporterait près de 3 milliards
Lors de l’examen du budget de la Sécurité sociale pour 2026, les parlementaires ont adopté plusieurs amendements proposés par les groupes de gauche. Ces textes prévoient de porter le taux de CSG applicable aux revenus du patrimoine de 9,2 à 10,6%. Cette augmentation de 1,4 point ferait mécaniquement grimper les prélèvements sociaux globaux de 17,2 à 18,6%, et donc la taxation finale à 31,4%. L’opération permettrait d’apporter environ 2,8 milliards d’euros aux caisses de la Sécurité sociale.
L’Assemblée nationale n’a pas achevé l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale dans les temps impartis. Le texte a été transmis au Sénat le 13 novembre sans vote solennel, conformément aux dispositions constitutionnelles. La chambre haute examine actuellement ces dispositions en commission depuis le 15 novembre, avec des débats en séance publique qui se déroulent du 19 au 24 novembre.
Des placements variés dans le viseur
L’ensemble des revenus assujettis au prélèvement forfaitaire unique seraient concernés par cette évolution. Les dividendes d’actions et de parts sociales entrent dans cette catégorie, tout comme les jetons versés aux administrateurs. Les intérêts des obligations, des comptes à terme et autres titres de créances subiraient également cette hausse. Les distributions des organismes de placement collectif, les revenus issus de fonds immobiliers et les gains de PEA retirés après cinq ans de détention figurent aussi parmi les produits touchés.
Certains dispositifs d’épargne restent protégés. Les livrets réglementés comme le livret A, le LDDS ou le livret d’épargne populaire conservent leur exonération totale. Les contrats d’assurance-vie souscrits et alimentés avant septembre 2017 bénéficient d’un régime fiscal distinct qui ne serait pas modifié. Les revenus mobiliers liés directement à une activité professionnelle suivent la fiscalité des entreprises et échappent au champ du prélèvement forfaitaire unique.
Des répercussions différentes selon les supports
Les plus-values réalisées lors de la vente de valeurs mobilières dans le cadre d’une gestion privée sont imposées à 12,8% au titre de l’impôt. Les prélèvements sociaux s’ajoutent à cette base. Les pertes peuvent être déduites des gains de l’année en cours, et les moins-values non utilisées peuvent être reportées pendant dix ans pour diminuer de futures plus-values taxables.
Pour l’assurance-vie, plusieurs paramètres entrent en jeu. Seuls les versements effectués après septembre 2017 relèvent du prélèvement forfaitaire unique. La durée de détention du contrat et le montant total des versements déterminent la taxation finale. Un contrat détenu moins de huit ans voit ses gains imposés à 12,8% d’impôt sur le revenu, plus les prélèvements sociaux. Au-delà de huit ans, un abattement annuel de 4 600 euros pour une personne seule ou 9 200 euros pour un couple marié allège la note fiscale.
Cette éventuelle augmentation s’inscrit dans un contexte budgétaire tendu. Si elle se confirme après le passage au Sénat et l’éventuelle convocation d’une commission mixte paritaire, elle pourrait modifier les comportements des investisseurs. Les produits réglementés bénéficiant d’une exonération fiscale pourraient retrouver une attractivité renforcée. L’épargne salariale, qui jouit de traitements fiscaux avantageux, pourrait également séduire davantage d’épargnants. Les contrats d’assurance-vie anciens, non concernés par le prélèvement forfaitaire unique, présenteraient un intérêt accru dans une optique de transmission patrimoniale.
La stabilité fiscale dont bénéficiait ce dispositif depuis 2018 touche peut-être à sa fin. Plusieurs autres amendements proposant des hausses encore plus importantes du taux du prélèvement forfaitaire unique ont été déposés dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2026, certains évoquant des taux allant jusqu’à 33% voire 36%. Ces débats témoignent d’une réflexion plus large sur la fiscalité du capital en France, dans un contexte où le pays figure parmi les derniers du classement OCDE en matière de compétitivité fiscale. Les dirigeants d’entreprise qui perçoivent des dividendes seraient particulièrement touchés, avec un taux global d’imposition qui passerait de 40,5 à 41,69% pour ceux qui détiennent une société soumise à l’impôt sur les sociétés.